Domitille Uma MacLeod [DONE]

-Oui et donc je lui ai dit...

Quoi ? Que lui a-t-elle dit ? Est-ce qu'elle a envoyé le dix de cœur sur les roses ? A moins qu'elle n'ai décidé de rester avec ce fripon. Oui, mais dans ce cas, que devient Petit Flamant dans l'histoire ? Va-t-elle continuer à entretenir sa hum... relation avec lui ? Naaaaan ! Impossible. Sinon, son père risquerait de la renier. Mais alors...

Dans l'esprit de Domitille, cela se passe toujours comme ça. Comme dans les feux de l'amour. Le cerveau de la jeune fille ou de la petite huître, c'est comme vous préférez, tourne toujours à cent à l'heure et regorge d'idées toutes plus loufoques les une que les autres. D'où lui vient son inspiration, ses sujets etc. ? Du pays des merveilles pardi ! Toutes ces histoires, elle ne fait pas que les inventer. Elle se sert de la vie de ses voisins et amis. Après avoir lu ceci, vous ne vous étonnerez sûrement pas si je vous dis que notre petite huître est une curieuse invétérée. Presque compulsive. Il lui faut sa dose de potins ou d'expériences loufoques chaque jour ou elle risque de craquer. Craquer ? me direz-vous. Oui, vous avez parfaitement bien entendu, ou plutôt lu. Craquer, ou bien si vous préférez, replonger dans une sorte de folie. Cette folie, elle a réussi à la dominer ou plutôt à l'écarter plus ou moins il y a quelques années. Si vous restez avec elle suffisamment longtemps pour qu'elle commence à s'ennuyer ou tout simplement à s'occuper de choses ordinaires, vous pourrez peut-être voir sur son visage, ce sourire caractéristique et tellement singulier qui lui vient dans ces excès de démence. Domitille n'est pas une véritable malade mentale, disons qu'elle est un peu dérangée. Une légère tendance à la pyromanie ainsi qu'au sadisme, des crises de fou-rires inexpliquées, des délires verbaux et hallucinatoires caractérisent ces crises. Quoique pour ces derniers, on peut dire que c'est monnaie courante au pays des merveilles. Domitille est un personnage très difficile à cerner.

Ce jour là, elle était justement en train d'espionner deux jeunes dames de la cour de sa maajesté la reine de cœur pour sa ration quotidienne de ragots et autres commérages. Elle suivait l’histoire que se racontaient les deux personnes depuis le début, jour par jour, mois par mois, et c’était mieux qu’un feuilleton télévisé. Un prétendant: j’ai nommé le dix de cœur, un amant: Petit Flamant, un père en colère et tant d’autres personnages faisaient office d’acteurs dans cette comédie rocambolesque. Domitille pistait les jeunes filles depuis un certain temps maintenant et dans sa tête se bousculaient moult scénarios tous plus improbables et subjectifs les uns que les autres à propos de l'issue de cette histoire.
Ses deux proies venaient de tourner à l'angle d'une allée. Domitille pencha la tête afin de choisir le moment où elles se seraient un peu éloignées pour continuer sa filature. Malheureusement, quand elle pencha sa petite tête trop curieuse, elle ne vit personne. Plus rien. Elle aurait pourtant juré les avoir vu tourner ici. Elle inspecta les environs, toujours aucune trace des deux demoiselles. Elle observa autour d'elle, leva la tête, se tourna et se retourna. Elle devina qu'elle se trouvait au beau milieu du labyrinthe de sa maajesté sa très chère reine de cœur. Elle ne s’était même pas aperçue qu’elle y était entrée. Elle porta sa main à son menton et prit une pose qui inspirait à la réflexion. Hum... pas étonnant dans ce cas qu’elle se fut perdue. Car il fallait bien se l’avouer, elle était bel et bien perdue. Elle n’avait aucune idée de l’endroit précis où elle était et ne savait en aucun cas comment sortir d’ici. Elle décida donc de s’asseoir, jugeant (un peu sottement) qu’il lui serait plus facile de penser dans cette position. Une fois qu’elle fut confortablement installée sur l’herbe fraîche, elle étendit ses bras vers l’arrière et se reposa dessus. Elle observait le ciel et s’aperçu qu’il devenait de plus en plus noir. Je ne m’étais pas rendue compte qu’il était si tard; se dit-elle à mi-voix. Soudain, derrière elle, elle entendit un bruissement. Elle se retourna promptement et examina l’endroit d’où venait le bruit. Elle ne vit rien. Lentement, elle revint dans sa position initiale et replongea dans ses rêveries. Elle avait complètement oublié qu’elle était perdue et qu’il fallait qu’elle sorte de ce labyrinthe. Un deuxième bruissement la fit se retourner une nouvelle fois. Cette fois, elle eut le temps d’entre apercevoir le bout d’une cape s’envoler dans les airs. Elle leva la tête. Au dessus d’elle, assis sur une branche d’arbre, notre chère petite huître distingua une silhouette familière. Le torse nu, une longue cape noire, un sourire immense et incessant,, pas de doute, il s’agissait bien du chat. Le célèbre et reconnu Chat du Cheshire. Il trônait sur sa branche comme la reine sur son trône et il paraissait parfaitement dans son élément. Domitille essaya de rassembler dans son esprit tout ce qu’elle savait à propos de ce personnage fantasque. Elle savait que le Chat était un grand manipulateur et qu’il aimait beaucoup se jouer des jeunes filles dans son genre qui se perdent dans le labyrinthe. C’était un charmeur invétéré et elle résolu de ne pas tomber dans ses pièges. Elle prit donc un air indifférent et parla la première.

-Si vous comptiez me perdre contre ma volonté cher Chat, sachez que je ne laisserai pas faire.

Voilà qui était fait. Elle avait posé ses limites. Elle n’avait pas l’intention de se faire avoir par un chat. Même si ce chat souriait, qu’il était très beau, très charmant et que... Non, non, non, il fallait qu’elle se reprenne.
Alors, avant même que M. du Cheshire ai pu dire un seul mot, elle se rua vers une allée proche et ne cessa de courir que lorsqu’elle fut sûre d’être assez loin de ce personnage. Bon, je vous l’accorde, sa réaction fut peut-être un peu exagérée mais pour elle, mieux valait jouer la carte de la prudence.
Enfin, maintenant elle se retrouvait de nouveau seule et sans la moindre idée de son emplacement. A présent la Lune était haut dans le ciel et les étoiles brillaient comme milles éclats de verre qu’on aurait éparpillés dans les cieux. Elle continua d’avancer, pensant, espérant surtout, croiser quelqu’un sur sa route. Ses prières furent exaucées. Non loin de l’endroit où elle était, elle vit une personne, de dos. Elle s’assura d’abord qu’il ne s’agissait pas encore de ce Chat du Cheshire puis, s’en était assurée, elle s’avança. Elle vint se placer devant l’individu et, quand elle l’eut reconnu, elle sourit et lui sauta au cou.

-Ha, mon sauveur !

Domitille relâcha un peu son étreinte lorsqu’elle se rendit compte qu’elle était à moitié en train d’étouffer son ami. Elle s’écarta tout en gardant les mains sur les épaules de Tartine beurrée. Tartine beurrée était le grand ami de Domitille. Le seul qui supportait ses étrangetés et ses sautes d’humeurs. Domitille l’adorait. Ils passaient des heures ensemble allongés sur l’herbe à inventer des formes aux nuages, passaient des après-midi à boire le thé chez le Chapelier fou et le Lièvre de Mars, pistaient leur petit monde en quête de secrets à révéler etc. On les voyait presque tout le temps ensemble.
Enfin bref, revenons au moment présent, ou plutôt passé vu le temps du récit que vous êtes en train de lire. La Petite Huître et Tartine Beurrée étaient donc au milieu du labyrinthe seuls. Domitille cherchait depuis des heures la sortie et elle se demandait si son ami connaissait le chemin. Comme si il lisait dans ses pensées, Tartine Beurrée lui demanda si elle voulait qu’il l’aide à retourner chez elle. Elle acquiesça d’un signe de tête. Son compagnon la pria de bien vouloir s’accrocher autour de son torse, elle le fit. Quelques secondes plus tard, Tartine Beurrée faisait un bon gigantesque qui les menait hors du dédale. On aurait pu croire qu’ils volaient tous deux dans le ciel noir. Après ce saut magnifique, ils se posèrent sans encombre à quelques mètres du mur de buissons...